30 mai 2025

Retour sur la série Netflix “Adolescence”


Avec plus de 124 millions de vues, Adolescence devient la 5ème série la plus regardée sur Netflix, en quelques semaines seulement. Véritable phénomène, cette mini-série dramatique britannique est à la fois poignante et dérangeante. Dans notre monde complexe et moderne, il n’existe pas de manière simple d’être parent, ni de manière simple d’être adolescent. Ce ne sont là que deux des vérités universelles au cœur de cette série.

Dès les premières minutes nous sommes happés dans la vie d’une famille ordinaire où on assiste à l’arrestation musclée de Jamie Miller, adolescent de 13 ans arrêté pour le meurtre présumé d’une camarade de classe. Comment tout bascule en quelques secondes, tel un véritable cauchemar. Pour ses parents, c’est un choc absolu. Leur fils est-il coupable ? A-t-il été manipulé ? Ou est-il victime d’une erreur judiciaire ? Pour que le spectateur puisse se forger son opinion, chaque épisode montre un point de vue différent : celui de Jamie le jeune suspect, les inspecteurs de police, la psychologue et ses parents.

En visionnant cette série, tout en chacun peut se dire “mais cela pourrait arriver à n’importe qui, moi y compris”. On se sent réellement concerné. Chaque épisode est filmé en un seul plan séquence, procédé qui permet d’accentuer la tension dramatique et plonge les spectateurs au cœur de l’action, rendant l’expérience encore plus réaliste et oppressante.

À travers une narration tendue, la série explore la construction identitaire, les limites de la confiance, les non-dits familiaux ainsi que l’impact des réseaux sociaux sur les adolescents. Nous y voyons plus particulièrement la problématique du discours violent et misogyne des influenceurs masculinistes.

Cette série est déconseillée aux moins de 12 ans par la plateforme, cependant il peut être intéressant de se dire qu’il est préférable qu’un enfant plus jeune puisse regarder la série en étant accompagné qu’un enfant plus âgé qui la regarde seul et qui peut être incité à se poser les mauvaises questions.

Avec son réalisme déconcertant et son climat anxiogène, cette série peut parfois paraître dure pour certains, notamment un public familial. Et pourtant, c’est en abordant des thématiques complexes comme la misogynie, le harcèlement scolaire et l’omniprésence des réseaux sociaux avec ses enfants qu’on leur permettra de se poser les bonnes questions.

Dans l’un des épisodes, les parents de l’ado suspecté de meurtre culpabilisent de ne pas avoir vu la radicalisation en ligne de leur fils et tentent de se remettre en question. Est-ce que la série doit nous inciter à faire plus attention à ce que font les ados sur les réseaux sociaux ? Nous vivons dans une société hyperconnectée. On n’a pas de maîtrise sur les contenus, simplement sur la manière dont on aborde et dont on parle des contenus. Ça amène les adultes à se poser des questions sur ce qu’on appelle les « enfants d’intérieur ». C’est-à-dire ceux qui nous semblent tout à fait rassurants parce qu’ils restent à la maison mais qui, en réalité, sont fermés dans un espace dans lequel ils vivent plein de choses vis-à-vis desquelles on a très peu de questions à leur poser parce qu’on a le sentiment que ça ne nous concerne pas. On pense qu’ils sont en meilleure sécurité chez nous, mais le danger existe malheureusement en ligne. En tant que parent, nous sommes vite perdus face aux nouveaux langages fait d’émojis et d’argot compris seulement par les jeunes entre eux. Cela est déconcertant aussi on s’en éloigne.

Ce type de série permet de comprendre que l’idée n’est pas forcement de maitriser ce que disent ou font nos jeunes, mais de s’y intéresser, de garder le lien, de lever la tête de nos écrans. Cette technoférence fait du tort en tout point, à tous les niveaux auprès de tous les membres de la famille.

Au Royaume-Uni, la série sera même diffusée dans les collèges et lycées tellement elle suscite un engouement. Une idée qui a traversé la manche jusqu’au ministère de l’Éducation et de l’Enseignement français. Ce dernier considère que la série est un “bon point de départ” pour débattre, sans pour autant parler de la rendre obligatoire. Cela représente un très bon support au niveau de la pédagogie scolaire pour pouvoir questionner les problèmes majeurs de notre vie en société actuellement. On espère que les institutions vont s’en saisir.

Aussi on vous propose quelques astuces pour prendre soin de la santé mentale de nos enfants et ados

* être à l’écoute, demandons-leur régulièrement comment ils se sentent afin qu’ils soient à l’aise pour parler de leurs émotions

* S’impliquer dans leur vie, montrons-leur de l’intérêt pour ce qui leur tiennent à cœur, cela renforcera leur estime de soi et nous aidera à identifier les problèmes s’il y en a

* Prendre au sérieux ce qu’ils disent, les écouter et faire attention à leurs émotions les feront se sentir valorisés

* Les soutenir dans les moments difficiles résoudre une situation n’est pas toujours aisée et vous pouvez les aider à comprendre leurs émotions.

* Essayer de ne pas tirer de conclusion hâtive ni de tout résoudre à leur place.

Il n’y a pas de parents parfaits, et heureusement cela permet aux enfants et adolescents d’être ce qu’ils sont, des êtres « imparfaits » en devenir.

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Flore Guattari

Psychologue du développement et de l’éducation. Psychothérapeute en Haptonomie. Animatrice d’ateliers parents.